Alphonse Mucha, icône de l’Art Nouveau

Alphonse (Alfons) Mucha (1860-1939) est un artiste d’origine tchécoslovaque et représentant majeur du style Art Nouveau. Comme à notre habitude, on ne s’intéressera pas ici à la biographie de l’artiste mais aux caractéristiques de son style susceptibles d‘enrichir le nôtre. Commençons donc par une vue d’ensemble de son œuvre très fournie :

Oeuvres d'Alfons Mucha.
Oeuvres d’Alphonse Mucha.

Des portraits de femmes, des courbes, des fleurs, des couleurs, le style d’Alphonse Mucha est très reconnaissable et son graphisme séduit facilement le public. Difficile de savoir par où commencer pour analyser ce style fourmillant de détails. Essayons quand même :

Des fleurs omniprésentes

L’Art Nouveau de façon générale laisse une grande place à la végétation et aux motifs floraux. C’est particulièrement vrai chez Alphonse Mucha qui a bien compris comment, en art, les femmes et les fleurs se marient bien. Végétation naturelle, ornements floraux, couronnes de fleurs sont omniprésents dans les portraits d’Alphonse Mucha et participent grandement à ce fourmillement de détails dont nous parlions à l’instant. La variété des fleurs, des formes et des couleurs s’accommode ainsi à tous les portraits. On pourrait dire vulgairement que c’est un remplissage facile et efficace, mais l’artiste nous montre ici la manière dont les fleurs participent à l’oeuvre et ne font pas simplement plante verte.

Les fleurs dans l'oeuvre d'Alfons Mucha.
Les fleurs dans l’oeuvre d’Alphonse Mucha.

Des positions élégantes

Alphonse Mucha ne se limite pas qu’aux portraits-bustes. Nombre de ses tableaux représentent des femmes de la tête aux pieds, et une grande importance est également donnée aux mains, particulièrement mises en valeur dans ses compositions. Vêtues presque exclusivement de robes légères, les femmes d’Alphonse Mucha dévoilent souvent leurs bras et leurs épaules. Plus originalement, on trouve beaucoup de femmes de dos aussi. On notera surtout comment les positions variées sont tantôt dynamiques, tantôt languissantes, et semblent toujours faites pour mettre en valeur une partie du corps et la présenter sous des angles avantageux. Pas question de présenter la femme dans une simple posture de face comme d’autres artistes le font sans cesse.

Notez dans les quatre images ci-dessous : la contraction du dos en 1), le dénudement, la position des doigts et le raccourci du bras gauche en 2), la superposition des doigts en 3), la mise en valeur du bras en 4) qui prend la moitié du tableau et la position caractéristique de la main, élément central du tableau. Ces détails, qui n’en sont finalement pas, participent à la richesse et à la complexité de l’oeuvre.

Des postures dynamiques ou languissantes, mais originales et recherchées.
Des postures dynamiques ou languissantes, mais originales et recherchées.

La « Formule Q » d’Alphonse Mucha

Il suffit de regarder les oeuvres d’Alphonse Mucha pour comprendre l’importance donnée à la composition quasi-géométrique de ces oeuvres. Positionnement des corps, agencement des courbes, répétition des motifs ornementaux, rien ne semble laissé au hasard. Alphonse Mucha est notamment connu pour sa fameuse « Formule Q« , nom donné à une composition récurrente dans son oeuvre et dont la forme générale rappelle la lettre Q.

On retrouve ainsi souvent un large cercle, orné de motifs floraux ou géométriques, qui encadre, voire auréole le portrait féminin. Et les jambes ou les robes longues forment la queue du Q en le dépassant par le bas.

Cette construction a bien sûr pour avantage de faire ressortir et de mettre en valeur le portrait féminins, et participe une fois de plus au fourmillement ambiant, à travers la finesse des ornements composant le grand cercle, véritable frise antique. On notera toutefois la manière donc la Formule Q déséquilibre le tableau en plaçant tous les éléments visuels important sur la moitié supérieure. Alphonse Mucha semble se satisfaire de cela et ne cherche pas à rééquilibrer la composition, quand bien même il lui serait facile de décorer les coins inférieurs comme le sont les coins supérieurs. Pas d’effort non plus côté couleurs : alors que le haut des quatre tableaux ci-dessous est coloré et contrasté, les bas sont laissés ternes. Il faut y voir un choix artistique clairement assumé et une volonté de garder le regard du spectateur vers le visage des femmes.

La Formule Q d'Alfons Mucha.
La Formule Q d’Alphonse Mucha.

Des motifs ornementaux

Revenons rapidement sur ces motifs ornementaux. Ils sont très fréquents dans l’Art Nouveau qui, s’il fallait le caricaturer un peu, pourrait être vu comme l’art des courbes et des ornements. Pas étonnant donc de voir la richesse ornementale des oeuvres d’Alphonse Mucha. Les motifs sont tantôt géométriques, tantôt floraux, et souvent les deux à la fois. Ils sont très utiles pour donner du dynamisme à la composition et encadrer le portrait féminin, ainsi que nous l’avons vu avec la Formule Q.

Léonard de Vinci disait qu’un bon tableau doit contenir de nombreux éléments de sorte à capter longuement le regard du spectateur. Alphonse Mucha semble avoir compris ce principe. Bien que ces ornements soient censés être secondaires dans ses tableaux, ils en sont finalement une composante aussi riche que caractéristique.

Courbes, géométrie et motifs floraux, aussi typiques de l'Art Nouveau que du style d'Alfons Mucha.
Courbes, géométrie et motifs floraux, aussi typiques de l’Art Nouveau que du style d’Alphonse Mucha.

Des drapés travaillés

Qui dit robe dit drapé, et Alphonse Mucha ne se prive pas de plier et replier le tissu de ses demoiselles. Pour ne rien changer, cela contribue toujours plus au fourmillement général de détails. Mais aussi et surtout, les drapés participent au dynamisme des positions des femmes. Même dans une posture droite d’apparence immobile, la femme semblera en mouvement si un drapé fin et serré semblent torsader sa robe. Les longs plis fins du tissus se mêlent alors aux courbes des cheveux ou des motifs floraux et finissent de donner à l’oeuvre l’effet d’un tourbillon dansant. C’est enfin une manière efficace de mettre en valeur les formes féminines sans trop en montrer, il faut donc y voir aussi un aspect glamour.

Drapés caractéristiques de l'oeuvre d'Alfons Mucha.
Drapés caractéristiques de l’oeuvre d’Alphonse Mucha.

Les contours du dessin

S’il y a bien une caractéristique qui symbolise le style d’Alphonse Mucha, c’est sans doute son utilisation des contours épais. Voyez dans les tableaux ci-dessous comment d’épaisses lignes noires encadrent bras, corps, fleurs et robe et les font ainsi ressortir du fond.

L’effet produit rappelle la bande dessinée, ou l’art du vitrail.Ce contours noir, au milieu du fourmillement ambiant, permet de distinguer plus nettement les formes, sans quoi le corps de la femme serait vite absorbé parmi les fleurs et les motifs ornementaux. Ici, une limite claire est posée, elle met au premier plan le corps de la femme, qui semble même flotter au-dessus du reste, comme un bloc par-dessus les entrelacs floraux.

On remarquera l’épaisseur, la netteté et la lissité du trait noir, qui vient partout simplifier les contours des différentes formes. Voyez notamment dans la 4e image ci-dessous comment trois courbes successives viennent respectivement définir l’épaule, le biceps et l’avant-bras, sans plus de détail, et comment, pourtant, la structure du bras apparaît clairement. Caractéristique du style Mucha, ce contours épais se trouve aussi chez d’autres artistes comme Bryce Cameron Liston, avec des effets similaires.

Le contour noir.
Le contour noir.

Des aplats de couleurs

Si les lignes, les courbes et les formes fourmillent de complexité dans l’art d’Alphonse Mucha, on ne peut pas en dire autant des couleurs, qui sont systématiquement des aplats simples ou, au mieux, des dégradés assez sommaires. Certains y retrouvent le style du dessinateur Moebius : dessin complexe, couleurs simples.

Ces aplats se trouvent essentiellement sur la peau des femmes et leurs robes. Les femmes de Mucha font ainsi office de clairières au milieu d’une forêt de motifs ornementaux. L’oeil est bien sûr immédiatement attiré, reposé même; par cette zone d’accalmie graphique où, en conséquence, le moindre pli de la peau ou de robe sera mis en valeur. Voyez ci-dessous : les plis de la robe en 1), le creux entre l’épaule et le bras droit en 2), ou les omoplates en 4) sont immédiatement repérables dans toute leur simplicité.

Tout ce jeu dynamisme/calme ou vide/rempli, est une part importante de la composition chez Alphonse Mucha.

Aplats de couleurs.
Aplats de couleurs.

Des chevelures en vagues

Terminons enfin par un regard sur les chevelures d’Alphonse Mucha. Débordantes de courbes, elles font évidemment écho aux courbes florales typiques de l’Art Nouveau. Elles ne sont pas là pour être réalistes mais pour participer au mouvement général et imprégner le tableau d’une danse tout en volutes. On remarquera une fois encore comme le contours noir en 2) ci-dessus fait de la chevelure un bloc lourd, sans pour autant casser le mouvement des mèches.

Chevelures en vagues.
Chevelures en vagues.

S’inspirer du style d’Alphonse Mucha

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Alphonse Mucha nous donne de nombreux codes graphiques à apprendre. Pour l’imiter, on se focalisera donc sur :

  • Des personnages aux postures riches et diversifiées.
  • Un épais ornement de motifs géométriques et floraux.
  • Des courbes, des drapés et du mouvement.
  • Un espace bien rempli et fourmillant.
  • Des contours noirs épais pour mettre l’essentiel en valeur.
  • De larges aplats de couleurs pour créer des clairières visuelles.

Inspirez-vous de ces codes-ci et vous devriez vite posséder un style proche de celui d’Alphonse Mucha. Une bonne dose de pratique sera toutefois nécessaire, mais pour un résultat admirable. Pour tout découvrir de l’oeuvre d’Alphonse Mucha, découvrez l’ouvrage qui recense toutes ses créations graphiques, tableaux, dessins, affiches, publicités :

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